Mobilisation des connaissances

Comment concevoir l’étape de mobilisation des connaissances ?
S’assurer que l’équipe chargée de la mobilisation des connaissances est représentative, bien construite et bien outillée
La mobilisation des connaissances concertée, c’est-à-dire qui implique l’ensemble des parties prenantes, peut produire des impacts tangibles et assurer une meilleure adéquation pour les communautés et milieux en plus de favoriser les objectifs de justice sociale et d’équité en santé. (Voir section Construction et maintien du partenariat)
Pour cela il est utile de :
- affirmer l’importance de la co-création des connaissances par les différentes parties prenantes tout au long du processus de mobilisation.
- discuter les résultats de la recherche avec l’équipe de recherche académique et les partenaires
- élaborer conjointement des plans d’action découlant de ces résultats pour favoriser le changement, notamment des actions de plaidoyer (advocacy)
- développer des stratégies de mobilisation de la communauté incluant le recrutement et la formation de membres influents de la communauté en question, par exemple les femmes racisées
L’évaluation participative des impacts de la diffusion peut donner des pistes d’amélioration continue des processus de mobilisation des connaissances.
Pour aller plus loin
Concevoir l’implication des partenaires dans la mobilisation des connaissances en tenant compte de leur disponibilité et de leurs atouts
Si ce n’est pas possible d’avoir tous les partenaires ou une représentation complète des personnes participantes sur l’équipe de mobilisation des connaissances, certaines personnes pourront être impliquées à des moments clés.
Cela peut, par exemple, impliquer que les membres académiques et partenaires des milieux prennent la parole ensemble pour partager les résultats selon le contexte.
Il peut être intéressant d’utiliser le fait que les membres académiques se trouvent plutôt dans des pays (ou quartiers) riches et les communautés dans des lieux plus défavorisés. Cela peut être mis à profit pour des stratégies de mobilisation et d’action allant d’une échelle locale vers le global. Il s’agit de soutenir et d’amplifier l’action locale des leaders et institutions pour avoir une influence malgré les obstacles ou résistances.
Pour aller plus loin
Concevoir l’étape de mobilisation des connaissances dès le début du projet, soit lors de la construction du partenariat, en allouant le temps et le financement nécessaire
- d’assurer l’allocation de ressources suffisantes pour assurer les retombées attendues du projet
- de favoriser le lien de confiance nécessaire à une relation d’échange pérenne, notamment lorsque les questions liées au sexe/genre sont sensibles.
- Être en accord avec ses propres valeurs
- Faire preuve d’écoute
- S’adapter à l’audience, au contexte
- Présenter les résultats s/g de façon progressive selon la capacité du milieu à les recevoir/intégrer
- (Agénor, 2020)
- (Lipscomb et al., 2005)
- Voir section Construction et maintien du partenariat
Renforcer les capacités en mobilisation des connaissances
Tant les partenaires, personnes participantes, communautés, et membres de la communauté scientifique ont à apprendre sur la mobilisation des connaissances dans un processus d’échange sur les univers réciproques. Il est important de renforcer les capacités de mobilisation des connaissances de l’ensemble des parties prenantes du projet.
Comment faire? Des actions concrètes peuvent être :
- Créer des espaces sécuritaires, des réseaux pour échanger sur les enjeux de la recherche en lien avec le sexe/genre, et favoriser l’expression de la voix des femmes et des personnes discriminées
- Mettre en valeur et se baser sur les connaissances et l’expertise des partenaires sur le sujet, notamment à partir des histoires et vécus, tout en identifiant explicitement la nature subjective de ces éléments de connaissance
- Offrir de la formation et de l’apprentissage pour développer une capacité organisationnelle à créer du contenu
- Favoriser l’identification et mettre en avant les succès, les aspirations, les valeurs, les forces et les rêves de la communauté comme vecteur d’une identité sociale et comme point de départ de l’action et du changement
Cela requiert des ressources suffisantes en temps, en créativité, et en ressources financières à considérer dès l’étape de financement du projet (voir section Construction et maintien du partenariat; voir section Méthodologie)
Pour aller plus loin :
Adapter le format de la mobilisation des connaissances en fonction de l’audience
Des choix peuvent être faits au niveau du format
Il s’agit de choisir des modes de communication en phase avec la complexité des sujets et la capacité collective de se les approprier.
Par exemple, on peut miser sur la transmission orale en fonction du niveau de littéracie et des caractéristiques cognitives des partenaires
Ou encore, on peut innover dans la manière de présenter les informations et anticiper leur circulation, notamment en ayant recours à l’analyse des réseaux de circulation d’information par exemple pour identifier qui diffuse l’information et pourquoi, qui la reçoit, à quel moment, en relation avec qui.
Des choix peuvent être faits au niveau des dispositions des personnes ciblées
Il importe de comprendre les conditions, les stratégies, les ressources qui permettent le développement du pouvoir d’agir, de la prise de parole et de la gestion féministe. Ces informations sont parfois plus importantes que les résultats mêmes du projet de recherche.
Ce développement du pouvoir d’agir chez les personnes qui souffrent des inégalités et de la discrimination peut passer par une prise de conscience, la construction d’une confiance en soi, l’élargissement de la palette des choix possibles, l’augmentation de l’accès aux ressources et du contrôle sur ces ressources, et la possibilité d’action sur les sources et causes des discriminations.
Pour aller plus loin
Chercher une diversité de moyens de diffusion, incluant une diversité de lieux et de publics
« J’ai participé en tant qu’agente de liaison au sein d’une organisation impliquée dans une recherche universitaire. Lors de la diffusion, je me suis déplacée pour participer à la présentation des résultats. Lors de la journée, les présentations qui s’adressaient à un public scientifique étaient plus formelles, à caractère scientifique. Alors que le soir, la salle d’une microbrasserie de la région a été louée, afin de présenter les résultats aux participants, participantes dans un cadre plus informel, communautaire, accessible. » (membre de l’Équipe GESTE lors d’une activité de réflexion)
Pour aller plus loin
Adapter le contenu de la mobilisation des connaissances en fonction de l’audience
Des choix peuvent aussi être faits en termes de contenu selon les situations rencontrées. Voici différentes stratégies:
- Utiliser des données probantes et des exemples concrets
- Désindividualiser les messages et éviter de reproduire des inégalités de pouvoir et de genre avec des jugements de valeur inappropriés ou stéréotypés
- Contextualiser les résultats, en faisant appel à des données à la fois quantitatives et qualitatives
Utiliser un langage différent pour aborder les enjeux entourant la discrimination selon les groupes et contextes (féministes intersectionnelles / activistes, professionnels, scientifiques, milieu mixte ou non mixte, etc.)
Pour aller plus loin
Clarifier les intentions du rôle du chercheur, de la chercheuse en fonction des objectifs de la mobilisation des connaissances
Avoir conscience de sa propre positionnalité comme chercheurs, chercheuses constitue une stratégie-clé pour assurer une mobilisation des connaissances constructive sur des questions liées au genre (voir aussi la section Approche théorique et question de recherche et voir la section Réflexivité).
“Dans certains milieux, tu n’es pas l’expert ou l’experte, mais ce sont plutôt les gens du terrain qui le sont. Ce sont eux qui ont le savoir et les connaissances. Dans un tel cas, ce n’est pas le rôle du chercheur ou de la chercheuse d’imposer une vision ou une idée. On voudrait plutôt être dans un rôle de partage (co-construction). Il est donc important de respecter son rôle prédéfini.”
(Membre de l’équipe GESTE lors d’une activité réflexive)
Cette prise de conscience passe par le développement d’une approche réflexive systémique, c’est-à-dire de réfléchir aux trois niveaux où peuvent se reproduire des rapports de pouvoir pour ne pas reproduire des inégalités en termes d’accès au pouvoir :
1) la prise de conscience de sa propre position par rapport aux autres (déséquilibres de pouvoir);
2) l’examen de l’importance de certaines voix par rapport à d’autres dans un projet et des conséquences qui en découlent pour les acteurs, les partenaires, la communauté, etc., et
3) la réflexion sur le projet de recherche lui-même et la manière dont les décisions sont prises (article Lefrançois et al., 2023 pour références clés, voir section Ressources).
Pour aller plus loin