Approche théorique et question de recherche

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Quelles sont les meilleures pratiques pour adopter une approche implicite ou explicite du sexe/genre ?

Selon le niveau de familiarité avec le sujet et l’ouverture des partenaires à aborder de front les enjeux de sexe/genre, il peut être utile de formuler une question qui aborde ces enjeux de manière sous-entendue ou tacite

Par exemple :

Objectif exprimé: Évaluer les facteurs de risque de troubles musculosquelettiques dans des postes de travail variés;

Objectif sous-entendu/implicite: Analyser des postes typiquement masculins et féminins afin d’offrir des interventions qui concernent les femmes autant que les hommes, malgré une préconception que les emplois tenus par les femmes sont moins pénibles.

À l’inverse, si les partenaires et collaborateurs s’entendent sur la pertinence sociale et scientifique à traiter le sexe et le genre dans une perspective d’équité ou de transformation du sexe/genre, il est suggéré de faire état explicitement de ce but pour aborder plus rapidement et directement les mécanismes expliquant la disparité de traitement dans la recherche. Ce type de prise en compte est plus susceptible de mener à des transformations systémiques, au-delà du milieu de recherche participant.

1er exemple – tiré des travaux de GESTE en santé au travail (Laberge et al., 2020)

Ces deux approches (implicite / explicite) surgissent souvent dans des contextes différents en ce qui concerne la reconnaissance ou non des sources d’iniquité par les milieux partenaires. Les résultats ont montré que ces deux façons de traiter les considérations relatives au sexe et au genre peuvent conduire à des impacts différents.

L’analyse des travaux des membres de l’équipe GESTE a montré que les initiatives traitant explicitement des enjeux d’iniquités dues au sexe et au genre obtiennent des impacts au niveau des pratiques et politiques à un niveau systémique, au-delà du milieu de travail dans lequel l’étude a eu lieu. C’est le cas des études menées dans le cadre du partenariat « L’invisible qui fait mal » entre 1995 et 2010 rattaché au Centre de recherche interdisciplinaire sur le bien-être, la santé, la société et l’environnement (CINBIOSE). Il est difficile, voire impossible, d’avoir un impact majeur sur les rôles genrés et les attributions de tâches au cours d’une intervention locale à court terme sans l’adhésion de la direction. Les études ancrées dans des milieux de travail, souvent réalisées à la demande de l’employeur, qui ne « voient pas » ou qui ne souhaitent pas aborder le sexe/genre provoquent des impacts en termes d’amélioration des conditions de travail qui somme toute améliore l’équité et la santé des travailleuses (ex. : ajustements des postes de travail, formation, organisation du travail visant à une meilleure équité).

2e exemple – tiré des travaux de GESTE en santé au travail (Laberge et al., 2021)

Dans cette étude visant à décrire comment de futurs intervenants et intervenantes en ergonomie considèrent le sexe/genre dans leur stage d’intervention, on a remarqué un malaise à considérer le sexe/genre directement et explicitement dans toutes les conduites de projet (n=5 étudiants et étudiantes suivis·es). Cela dit, plusieurs ont fait des actions dans la conduite de leur intervention qui ont permis de le prendre en compte, par exemple : présenter des résultats d’analyse en précisant le sexe/genre des personnes salariées étudiées, rendre visibles des difficultés à des postes jugés moins pénibles a priori (souvent occupés par des femmes).

Pour aller plus loin :

Certaines circonstances peuvent amener à la décision de garder implicite la prise en compte du sexe/genre dans le projet de recherche intervention tout en imaginant une stratégie tacite de partage de ces connaissances. Par exemple, s’il y a une résistance de membres influents de l’équipe, s’il y a une peur de mettre un groupe à l’écart, si on anticipe des obstacles dans le développement de l’intervention ou s’il y a une crainte de perpétuer des stéréotypes.

« De la manière dont je conçois toute ma méthodologie, je trouvais ça plus approprié, à ce stade-ci, de maintenir invisibles tous ces enjeux-là et de voir par la suite comment on peut les intégrer dans les communications, les publications, le transfert de connaissances. » (Vécus d’experts, d’expertes, résultats d’un projet de l’équipe GESTE).

“Le sexe/genre, il faut savoir l’intégrer de manière stratégique c’est-à-dire choisir le bon moment, le bon interlocuteur, la bonne façon de l’aborder, et parfois, en parler à travers un tout autre sujet. (Vécus d’experts, d’expertes, résultats d’un projet de l’équipe GESTE]

« Je pense qu’on peut faire des analyses dont l’accent n’est peut-être pas si dominant en termes de genre, mais que l’analyse des résultats nous permet de démontrer qu’il y a peut-être là des complexités qui nous échappent. » (Vécus d’experts, d’expertes, résultats d’un projet de l’équipe GESTE)


Pour aller plus loin Voir section Construction et maintien du partenariat

Prévoir des mécanismes dans la conduite du projet qui changeront les représentations du sexe/genre portées par les différentes parties prenantes.

Pour ce faire, présenter clairement la signification d’une approche transformatrice du sexe/genre. Il n’est pas obligatoire de cliver entre les sexes, l’important est de transformer les représentations sur les rôles et rapports sociaux dans la dynamique régissant les relations humaines.

Pour aller plus loin